Agitée par Cat Smith

Pas possible ! Je me suis encore laissée aveugler par la colère.

Pourtant, après qu’un jeune serbe m’ait donné une sacrée leçon de tolérance l’année passée, j’avais juré qu’on ne me reprendrait plus au sectarisme primaire.
J’allais désormais me conduire en démocrate éclairée, objective et clémente
Et bien, c’est raté !
Samedi. Après midi légère et ensoleillé, je sors de chez moi, insouciante, tenant en main les feuilles jaunies de mon olivier, bien décidée a sauver mon arbre. Et cette fois (la troisième en dix jours) je ne laisserai plus le charmant pépiniériste me rembarrer avec le sourire narquois de l’érudit (par opposition a vous qui êtes complètement idiote) « Mais non madame, je vous assure, je ne vois aucun parasite, aucun champignon, votre arbre est parfaitement sain (par opposition a vous qui l’emmerdez depuis dix jours). C’est un processus normal ; Les nombreuses nouvelles pousses balayent les anciennes qui jaunissent et tombent. »



Je grimpe dans ma cacahuète (on ne s’appelle pas voiture en dessous de 1400 CC),
et je démarre.
Mon attention est attirée par une marée vociférante de l’autre côté du boulevard.
Des calicots et des mégaphones, c’est quotidien dans notre capitale mais là il y a vraiment beaucoup de camions anti-émeutes et plus de flics en civil (oui même en civil et a cinq cent mètres, moi, je les reconnais)

Quand le texte en première ligne me tord instinctivement les tripes
« NON A L’AVORTEMENT » « SAUVEZ NOS ENFANTS » …
Et j’en passe. Des moins marrantes.
C’est bien connu on ne lutte pas contre ses instincts. En tout cas pas moi.
Je stoppe net la voiture en double file au milieu de l’ Avenue de la Toison d’or et je rejoins l’autre rive sans plus aucun discernement. Déterminée a en découdre.
Je fonce, comme une furie, croisant tous les flics qui devancent le cortège.
Curieusement aucun ne me stoppe. Il faut dire que je n’ai pas vraiment la tenue de l’activiste en mission ; Jeans italien hyper moulant, petit top estival, mes plus haut talons, et cheveux au vent ; Ils ne regardent que mes jambes et ratent la fureur dans mes yeux.
Heureusement que les islamistes ignorent encore ce stratagème et ne fassent pas encore appel a des ayatollates sexy pour exploser nos métros.
Me voilà en face des apôtres de l’Opus Dei. Curieusement, jeunes, et, je dois bien l’avouer, bien plus calmes que moi. Là, a cours de souffle et d’éloquence, je hurle tout et surtout n’importe quoi aux suppôts adorateurs d’un Dieu qui ne s’y retrouverait sûrement pas.
C’est là qu’une violente douleur me fait tourner la tête ; un facho en cuir noir, combat-shoes, t cheveux rasés et lunettes noires, me tord le bras et me tire sur le côté.
Je crie, « Fasciste, obscurantistes. C’est vous les assassins. Assassins des libertés »
Il me jette sur le côté, je suis en larme, je rejoins ma voiture a cours de souffle.
K.O.
Juste là, je croise une petite fliquette et je lui lance, en sanglotant :
« Comment pouvez vous laisser faire cela ? »
Et elle me répond : « Si vous ne retirez pas votre voiture de là immédiatement je vous colle un PV ! »

Avec 24h de recul je réalise que c’est moi qui suis conne. Je me dis démocrate ?
Et bien c’est ça la démocratie. Que chacun ait le droit de défiler pour ses convictions.

Aujourd’hui je me dis que c’est vraiment la plus grosse connerie que j’aie faite récemment.
Excepté avoir fini la soirée du 1er Mai que mon chéri et moi passions chez son meilleur ami, dans le lit de ce dernier, et ne lui laissant dans les draps, quand mon amour m’a ramenée a la maison sur son épaule le mercredi matin que les restes du dîner de la veille, visiblement trop arrosé. Heureusement quelques jours plus tard ils en rient déjà tout les deux de bon cœur.
Moi, pas encore.

Y’a pas a dire, y’a vraiment des semaines ou je me surpasse !
Mais rassurez vous, dimanche je ne suis pas allée a Rhôdes Saint Genèse manifester contre les flamingants séparatistes.
D’ailleurs à ce que j’ai vu aux infos, là bas, même les flics n’ont rien osé faire…
Ils se sont gentiment laissés taper dessus !